Musée du Quai Branly...The Color Line...une exposition ironique ???
L'exposition « The Color Line, les artistes africains américains et la ségrégation » au Musée du Quai Branly –( Jacques Chirac), est un événement. (info ici)
Six cents œuvres d’artistes afro-américains présentées dans un musée français, ce n’était pas arrivé depuis…ben depuis …jamais !!!!!
Et si l'on en croit le titre de
l’exposition, le dossier de presse, et la presse elle même, le prisme qui
oriente tout le parcours est la question de la ségrégation raciale dans l’Amérique
des années 1850-1980, puisque tout va pour le mieux depuis…
C’est donc un événement, mais malheureusement c’est ce prisme
ségrégationniste qui pose problème. Comme une grille sur un regard, toute la
force de l’art afro-américain (appelez cette production totalement américaine
comme vous le voulez) est ici réduite à un état :
l’art contestataire,
protestataire, raciale. Aucun
artiste de l'exposition ne semble avoir créé pour le pur besoin de créer en tant qu’être
humain. Point de commentaires sur les recherches formelles, point d’exaltation
des pouvoirs de la couleur ou de la matière, non…tout est orienté pour gommer
la part artistique de gens qui étaient et sont toujours des artistes.
Dans
les années 80, au moment où Jean-Michel Basquiat opère sa "révolution" esthétique, William Rubin (chantre du primitivisme moderne chez Picasso et bien
d’autres) faisait encore preuve de …bêtise insondable…en comparant les sculptures
d’Alexander Calder et d’un artiste anonyme de Papouasie-Nouvelle-Guinée[1]. En comparant le geste et
l’idée, l’expression et le jeu, Rubin célébrait l’artiste blanc comme un
créateur, le non européen comme un simple inquiet pour qui l’art est une
formule de protection.
Et
l’on pensait ce temps biaisé révolu ?
Les
artistes modernes afro-américains
semblent être les douloureux héritiers de ce regard que l’on portait déjà sur
les arts dits « primitifs »,
« premiers », « tribaux » et que nous appelons par convenance aujourd’hui « non-occidentaux » ou « extra-européens »
tant que l’Europe existera…
Paroxysme ironique de cette exposition à oeillères…présenter des artistes noires
contestataires, qui dénonce les lynchages, l’esclavage, le déracinement des
populations, dans un musée constitué de plus de 100 000 objets africains pillés
en Afrique dans la première moitié du XXème siècle.
Il
fallait un sacré culot, la France l’a
fait !
[1] Sally
Price, Arts primitifs, regards civilisés, Ecole Nationale Supérieure des
Beaux-Arts, 2006 (1989 pour l’édition américaine).
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